Danses et Musiques du Monde
Danses et Musiques du Monde
Si la flûte Kaval a pour origine « q-w-l », « parole » en arabe, Kathak trouve sa racine dans le terme « katha », histoire en sanskrit.
A travers le corps des danseuses qui se frôlent, se touchent, se miroitent et s’unissent, les histoires de deux traditions se racontent et se re-content sous le flux des temps actuels. Deux flots apparemment étanches, se mêlent et fusionnent.
Le Gange comme le Danube, ont bercé deux grandes civilisations ; leurs eaux sont matrices de deux cultures très anciennes. Comme l’indique Durand, « Dans la tradition indoue il y a fréquentes assimilations de la Grande Mère à un fleuve : le Gangâ céleste réservoir de toutes les eaux terrestres. Les Vedas surnomment les eaux « मातृतमः » ‘matritamah’ les plus maternelles. Cette assimilation reparaît en Occident puisque le fleuve Don tiendrait son nom du dieu Tanaïs. Don et Danubius sont, d’après Przyluski, des déformations scythiques et celtiques d’un très ancien nom de la déesse-mère analogue à Tanaïs. »
Cette création explore l’eau aux visages multiples ; tantôt maternelle elle nous immerge dans la tradition, tantôt multiforme, capricieuse et avide du renouveau elle réclame la transformation. Cette création propose la confluence heureuse du Gange et du Danube.
Pour cette création, il nous semble intéressant de poser notre réflexion sur quelques textes fondateurs tels celui de Marguerite Yourcenar : Le temps ce grand sculpteur.
« La légende sacrée ne s’exprime peut être nulle part plus délicieusement que dans un objet de culte provenant d’Inde du Sud, et aujourd’hui au Musée Guimet
Confluence du Gange et du Danube : un bas-relief sur bois où l’on voit Krishna habillé en berger jouer de la flûte aux bêtes du troupeau. Seuls les quadruples bras rappellent dans cette image délicatement humaine la toute puissante énergie divine / deux mains tiennent l’instrument; deux mains bénissent. Cette oeuvre assez tardive est l’une de celles où l’on voit le mieux, à travers la luxuriance hindouiste du style, s’exercer encore un lointain effet de l’influence grecque qui marqua l’art hindou à ses origines. Le hanchement du « Dieu bleu » est presque praxitélien…
Une mélodie silencieuse, où nous reconnaissons cette musique poignante, physiologique et sacrée qui est celle de l’Inde, s’épand des lèvres du dieu sur les feuillages touffus, les bêtes, les formes indolentes et rythmées de la posture divine.
Ce chant solitaire nous aide à mieux comprendre les trépignements frénétiques des Gopis autour des piliers des temples, le grand mouvement saltatoire des mille couples pâmés dans la forêt, et qui sont eux-mêmes la forêt des êtres…Ce que l’Inde ajoute à cette immense pastorale cosmique, c’est le sens profond de l’un dans le multiple, la pulsation d’une joie qui traverse la plante, la bête, la déité, l’homme. Le sang et les sèves obéissent aux sons du flûtiste sacré; les poses de l’amour sont pour lui des figures de danses.